• ocre terres et couleurs
  • Association loi 1901 pour la promotion des ocres et des terres colorantes

  • nuances d'ocre

cathédrale de Bayeux (Calvados)

juin 2018 - 120 kilos de peinture - 33 participants


Coup de neuf pour les portes de la ville.

Une trentaine de membres de Terres et Couleurs, association qui prône l’emploi de l'ocre et des peintures naturelles, ont repeint des éléments en bois de la mairie, l’hôtel du Doyen et la cathédrale.

« L’ocre n’est pas une couleur ! »

Pas un gros, mais un beau chantier. Pour ce 25ème chantier mené par l’association Terres et Couleurs, une trentaine de bénévoles ont effectué le déplacement. L’objectif de cette opération « couleurs locales » était de repeindre les portes de la mairie, de l’enceinte de l’hôtel du Doyen et de la cathédrale. « Ce n’est sans doute pas notre plus gros chantier, expliquait samedi Félicien Carli, président de l’association, puisque nous avons repeint jusqu’à des villages entiers, mais c’est l’un de nos plus prestigieux. » Cette journée de samedi représentait l’aboutissement de plus de deux ans de préparation du projet.

Au plus proche de l’authentique

Conservateur de la cathédrale, l’architecte des Bâtiments de France Jérôme Beaunay est à l’origine de cette opération « coup de neuf ». « Voici environ cinq ans que j’ai repéré le travail de cette association, relate-t-il. Je les ai contactés et nous avons envisagé leur venue voici plus de deux ans. » Parmi le travail préparatoire figuraient les recherches sur les couleurs à utiliser, « au plus proche des traces de peinture retrouvées sur certaines portes de la cathédrale », précise l’architecte. Le choix s’est porté sur des ocres de l'île d’Ormuz, « que nous étions allés chercher en Iran il y a dix ans », se souvient Félicien Carli. « Nous avons opté pour cette teinte la plus violacée, comme un clin d’œil au violet de Bayeux », signale Jérôme Beaunay. Pour les éléments situés sur les parties hautes de la cathédrale, le choix s’est porté sur une ocre, couleur chocolat, une terre d'ombre de Chypre.

Retour au pays

Marie-Annick, qui compte à son actif une vingtaine de chantiers du même type, n’aurait pas raté ce chantier à Bayeux. « Je suis originaire de Caen, alors peindre la cathédrale, c’est très symbolique. » Même chose pour Luc, qui a grandi à Creully : « Petit, je venais à la messe à la cathédrale de Bayeux. » Ces bénévoles de Terres et Couleurs, association basée à Paris, ont généralement un lien avec l’architecture ou une profession artistique.

Juste à temps

La pose des deux couches de peinture relevait quelque peu d’une course contre la montre : « Il fallait que le chantier de la cathédrale soit terminé à 17 h 30, souligne Jérôme Beaunay, avant la cérémonie de première communion prévue ce samedi en fin de journée. » À 17 h 32, les bénévoles ont posé les pinceaux !

Les pieds dans l’Aure

La peinture étant 100 % naturelle, les bénévoles sont allés laver leur matériel dans l’Aure, en amont de la roue à aube de la rue des Teinturiers, « puisque cette peinture est totalement naturelle ». Joyeux moment marquant la fin du chantier. Et impressionnant de voir le cours d’eau se teinter de rouge... on ne sait pas ce qu’en ont pensé les poissons en aval !

Emmanuel Poix est l’un des bénévoles de l’association Terres et Couleurs. Trois questions à l’un des derniers fabricants français de terres colorantes naturelles, installé dans les Ardennes.

On parle souvent de l’ocre comme d’une couleur. On se trompe ?

L’ocre, ce n’est pas une couleur, mais une matière. C’est devenu dans le langage courant, un mot pour désigner une couleur entre le jaune et le rouge foncé, mais en fait, il faut parler des ocres. Ce sont des terres qui ont pour point commun de toutes contenir de l’oxyde de fer. C’est en chauffant plus ou moins cette terre que l’on obtient les ocres, les pigments, utilisés comme colorants. En France, il existe trois bassins de production des ocres : le Vaucluse, la Bourgogne et les Ardennes.

Avec ces ocres, on dispose d’une large gamme de couleurs ?

Pour ma part, je dispose d’un catalogue de 45 pigments et 80 couleurs naturelles, qui vont du jaune au noir. On n’a rien inventé : l’homme préhistorique avait remarqué qu’en faisant du feu sur la terre, elle devenait rouge... c’est la peinture utilisée à Lascaux ! En ajoutant des liants, comme l’huile, la farine ou le savon, on obtient une peinture qui tient longtemps et est insensible aux UV.

Et cela coûte cher ?

Pas forcément... avec un kilo de pigment à 6 € environ, auquel il faut ajouter le coût du liant telle que l’huile de lin, on peint environ 15 m2. Mais cela reste abordable dès lors que l’on effectue les travaux soi-même.

Ouest-France  - 18 juin 2018
Nathalie LECORNU-BAERT.


reportage sur l'opération